Presse néerlandaise du mercredi 25 septembre 2002

L’heure est à la crise : crise irakienne sur le plan international,
avec le rapport des services secrets britanniques présenté hier par le premier
ministre Tony Blair, crise au sein du PvdA, qui est dans tous ses états à la
suite des sévères conclusions de la commission De Boer concernant les causes
de la cuisante défaite électorale du 15 mai dernier.

-  
NRC Handelsblad
d’hier soir : "La Bourse d’Amsterdam en chute libre – Les cotes les plus
basses depuis décembre 1996", "Blair : Saddam représente un danger
aigu", "Une auto-analyse entraîne une querelle au sein du PvdA",
"La police d’Amsterdam arrête 210 Européens de l’Est"

-  
De
Telegraaf

 : "Saddam est prêt pour une offensive biologique", "Wellink
reste optimiste sur l’économie"

-  
Trouw
 : "Blair voit une montagne de preuves contre l’Irak", "Bisbille
au sein du PvdA à la suite d’un rapport critique"

-  
de
Volkskrant

 : "La direction du PvdA est furieuse à cause d’un rapport sévère – Le
président Koole juge le rapport De Boer blessant, Van Nieuwenhoven renonce à
prétendre au leadership du parti", "Report de l’équilibre des
budgets dans l’UE"

-  
Algemeen
Dagblad

 : "La crise du PvdA s’aggrave – Jugement très dur sur la campagne électorale",
"Les preuves contre l’Irak accueillies avec réserve"

 

* * *

Le dossier du jour
 : Crise du PvdA

" La lutte pour le leadership
politique du PvdA a pris un tournant inattendu du fait que la présidente du
groupe parlementaire, Jeltje van Nieuwenhoven, a retiré sa candidature hier
",
annonce le Volkskrant dans son grand
article à la une. " Elle l’a annoncé
le jour même où une grande consternation a saisi le parti et le groupe
parlementaire, à la suite du rapport dévastateur présenté par la commission
d’évaluation de la campagne électorale du PvdA
."

"Le président du parti, Ruud Koole, qui, comme l’ex-leader Ad
Melkert, fait l’objet de sévères critiques à cause de son ’action
malencontreuse’, a déclaré hier soir qu’il jugeait le document ’pas équilibré’,
’inutilement blessant pour certaines personnes’ et ’inexact et pas fair
play
’."

"La présidente de la commission, Margreeth de Boer, a affirmé
qu’elle soutenait toujours pleinement les conclusions du rapport. Elle a déclaré
que ’la résistance massive de la direction’ lui a déplu. ’Nous comprenons que
le rapport brosse un tableau gênant. Il est évident que nous nous sommes
demandé si nous devions nommer les choses par leur nom et nous savions que cela
choquerait. Mais ce choc douloureux est nécessaire pour entamer un processus de
changement."

" Selon ce rapport, la défaite
électorale historique du PvdA est imputable au comportement peu professionnel
de la tête de liste Ad Melkert, qui était entouré par une équipe en proie à
des tensions et des conflits internes
. Le PvdA se voit reprocher d’être un parti gestionnaire ’peureux et
arrogant’, qui s’est avéré incapable de formuler des réponses aux grands
problèmes
."

"En décembre, les membres du PvdA éliront un nouveau leader. Van
Nieuwenhoven avait jusqu’à présent affirmé que sa candidature dépendrait de
sa prestation lors du débat de politique générale (la semaine dernière).
Elle a affirmé hier qu’elle en avait gardé ’un bon sentiment’ et a créé une
surprise en annonçant qu’elle renonçait à participer à l’élection parce que
la procédure ne lui plaisait pas. Le groupe parlementaire PvdA, durant sa réunion
à huis clos mardi matin, s’était déjà montré très surpris. Certains députés
PvdA supposent que c’est surtout le ton personnel très dur du rapport De Boer
qui l’a incitée à jeter l’éponge. L’ancien
ministre Klaas de Vries envisage maintenant de s’engager dans la course au
leadership du parti, contre Wouter Bos qui reste pour l’instant le seul candidat
.
De Vries estime que les membres doivent ’avoir le choix’. Il renoncera peut-être
si Adri Duivesteijn entre en lice. Ce dernier a toujours dit qu’il le ferait
peut-être si Van Nieuwenhoven se retirait."

 

Voici les principaux points du rapport De Boer :

- Le PvdA, au fil des années, est devenu un parti gestionnaire
introverti, terne et peureux, qui a perdu tout contact avec l’électorat,
surtout les classes inférieures.

- L’équipe de campagne électorale était "mal huilée",
"rongée par des tensions internes", n’avait aucune réponse à Pim
Fortuyn et se concentrait trop sur la personne de la tête de liste.

- La direction haguenoise du PvdA visait surtout à conserver ses
propres positions de force. Elle bloquait sciemment le débat interne et
sanctionnait l’indépendance de pensée.

- La tête de liste Ad Melkert était l’incarnation de cette politique
haguenoise introvertie. Il était "acharismatique", "underperforming"
et il n’était pas ouvert aux formes alternatives de campagne.

- Le parti sous-estimait de façon fatale le malaise multiculturel de la
population.

- Le PvdA a en grande partie perdu son profil social-démocrate. Son
profil était flou.

- Ce manque de profil a contribué à créer
le climat politique dans lequel le populisme de Pim Fortuyn a pu se développer.

Pour l’éditorialiste du Volkskrant , les "réactions
crispées" des principaux acteurs du drame, Koole et Melkert, "font
craindre le pire pour l’aptitude du PvdA à se tirer du marécage par ses
propres cheveux"
, comme le baron de Münchhausen.

De l’avis du commentateur du Trouw ,
" ce qui est gênant dans le rapport De Boer, c’est qu’il évoque
fortement un sentiment de ’déjà vu’ : il ressemble comme deux gouttes
d’eau au rapport de la commission Gardeniers, qui, il y a huit ans, a analysé
le déclin du CDA
." "Le rapport de cette ’sage’ a ramené un
certain calme au sein du CDA et a posé la base de son rétablissement. Le PvdA
ne s’autorise pas ce calme, mais se laisse monter le bourrichon et perd de façon
gênante son capital humain. Sur cette toile de fond, il est compréhensible que
Van Nieuwenhoven se sente désavouée et jette l’éponge. Un parti qui traite
ses ressources humaines avec autant de désinvolture a encore un long chemin à
faire."

 

Actualité internationale

Irak

" Le rapport britannique sur
les efforts entrepris par l’Irak pour se procurer des armes de destruction
massive n’annonce pas de nouveaux faits spectaculaires
", relève le NRC Handelsblad
(p.5) d’hier soir. " Mais il rend
plausible la thèse selon laquelle Bagdad n’a jamais cessé de développer de
telles armes
." "Durant les quatre années qui ont suivi le départ
des inspecteurs de l’ONU, en décembre 1998, de nombreux indices clairs de
telles activités ont été trouvés. Il est plausible que l’Irak ait poursuivi
le développement d’armes de destruction massive même durant les
inspections."

" La faiblesse du rapport réside
dans l’anonymat des déclarations, ce qui est évidemment un problème inhérent
à toute information émanant d’un service de renseignement
. Un
autre est l’aspect ’double usage’ de beaucoup de produits
. Presque tous les
produits et matières premières indispensables pour la fabrication d’armes de
destruction massive connaissent une application civile anodine que l’Irak pourra
toujours invoquer."

Compte tenu du caractère exhaustif du rapport
britannique, " il est remarquable
qu’il ne souffle mot d’un possible rôle des terroristes d’Al Qaeda aux côtés
de l’Irak
", conclut l’analyse du journal du soir.

" Un
dossier sans preuve et avec des resucées
", titre ce matin le Volkskrant
(p.5) au-dessus d’une correspondance de Londres. "Ce rapport semble être
surtout un réquisitoire du premier ministre Tony Blair dans le rôle de
procureur." Le correspondant du journal de centre-gauche souligne lui aussi
que "le dossier, peut-être faute de preuves ou d’indices, n’établit pas
le moindre lien entre la ’terreur’ de Bagdad et les activités de groupements
terroristes comme Al Qaeda".

" S’il
s’agissait d’un procès contre l’Irak et si le dossier britannique sur les armes
de destruction massive de l’Irak renfermait les principales preuves, Tony Blair
– juriste de son état – aurait du mal à convaincre le jury
",
remarque l’ Algemeen Dagblad (p.7).
"Selon Dick Leurdijk, de l’Institut Clingendael, le dossier a surtout un
usage de politique intérieure. ’Il s’agit de convaincre les récalcitrants de
son propre parti et d’obtenir le soutien du Parlement à une éventuelle
guerre’." "Selon Leurdijk, ’il faut reprendre les inspections de
l’ONU, car il serait naïf de croire que le leader irakien, depuis le départ de
la dernière équipe en 1998, a fait amende honorable’." "’Blair parle
expressément de la nécessité de désarmer l’Irak. C’est autre chose que le
’changement de régime’ que prône Bush. Manifestement, le premier ministre
britannique tient à suivre la voie du Conseil de Sécurité et des inspections,
parce qu’elle offre une base juridique suffisante pour lancer une offensive, si
elle devait s’avérer nécessaire. J’ai le sentiment que Blair est toujours en débat
avec Bush sur ce point’."

" Tony
Blair n’est pas le seul avocat du président Bush
", fait valoir le Financieele
Dagblad
à la une, à propos de la deuxième
visite en peu de temps de De Hoop Scheffer à Washington
. "La nouvelle
équipe gouvernementale à La Haye joue également un rôle." " Le changement de gouvernement à La Haye arrange bien le gouvernement
Bush
." " Avec De Hoop
Scheffer, les Pays-Bas semblent avoir un nouveau un atlantiste de la plus pure
eau comme ministre des Affaires étrangères
, constatent les Américains. Et
Bush voit bien que La Haye, après les élections, a un gouvernement
centre-droit plus conservateur. Le président américain, qui a adopté un
profil idéologique clair pendant sa campagne électorale, avec son compassionate conservatism, discerne des points de repère à La
Haye, comme Clinton en a trouvés dans la philosophie de la Troisième Voie et
le Nouveau Centrisme des sociaux-démocrates européens. Aux yeux des Américains, La Haye est de nouveau un terrain d’essai idéal
où l’on peut lâcher un ballon avec une certaine régularité
. Ils le font
dans le débat politique sur les traités européens, dans lequel l’ambassade
des Etats-Unis à La Haye est active, et ils le font désormais aussi dans le
dossier de l’Irak."

" Il
est absurde d’exiger de Washington qu’il fasse unilatéralement un pas en arrière,
en raison d’alliances qui freinent parfois inutilement la politique de sécurité
américaine
", estime l’éditorialiste du NRC Handelsblad à propos de la "doctrine de Bush".
" Mais cette nouvelle doctrine cache
de sérieux dangers politiques
. En revendiquant unilatéralement le droit
d’agir préventivement, on hypothèque l’Etat de droit international et on crée
un précédent dont d’autres pays peuvent profiter. En outre, les responsabilités
que prennent les Etats-Unis sont si immenses qu’elles susciteront davantage
d’opposition et peut-être de résistance à mesure qu’ils les exécuteront plus
fermement. Il faudra beaucoup de talent diplomatique et tactique pour empêcher
les ’amis et partenaires’, que la doctrine affirme respecter, de décrocher. La
relation ouvertement ’pourrie’ entre les Etats-Unis et la République fédérale
ne doit pas présager les nouvelles relations conformément à la doctrine de
Bush."

Le commentateur du Telegraaf , réagissant au rapport de Tony Blair, estime que
"l’Irak doit se défaire de ses armements bon gré mal gré". " Il
y a désormais suffisamment de raisons d’agir préventivement
."

 

Afghanistan

"L’Allemagne parle avant son tour", titre l’ Algemeen
Dagblad
(p.6). " Tentant de rétablir
rapidement la relation avec l’Amérique, l’Allemagne a proposé hier de prendre
le commandement de l’ISAF, la force
de paix internationale en Afghanistan, avec les Pays-Bas, au début de l’année
prochaine
. Cette offre allemande a
mis dans l’embarras le gouvernement néerlandais, qui devait encore en informer
la Deuxième Chambre
. Des sources néerlandaises à Varsovie, où les
ministres de la Défense ont clos leur séance informelle d’automne, ont estimé
que l’action allemande était bien diligente. Le ministre allemand Peter Struck,
par son geste rapide, pensait pouvoir réparer quelque peu le préjudice porté
aux relations américano-allemandes, qui ont gravement souffert de la campagne
électorale allemande."

"Le président Bush a omis de féliciter
le chancelier Schröder après sa réélection et le ministre Rumsfeld (Défense)
a évité son homologue allemand à Varsovie" (également de Volkskrant p.2, De
Telegraaf
p.3).

 

Economie,
Finances

Pacte
de stabilité

"Les pays de la zone euro auront deux ans de répit pour mettre de
l’ordre dans leurs budgets", annonce Geert-Jan Bogaerts à la une du Volkskrant ,
depuis Bruxelles. "La Commission européenne a cédé aux pressions des
grands pays de la zone, qui réclamaient plus de temps. La Commission a fait
savoir hier que ces pays auront jusqu’en 2006, au lieu de 2004, pour éponger
leur déficit budgétaire. Elle a néanmoins ajouté immédiatement qu’on ne
touchera pas au Pacte de stabilité."

"La nouvelle politique est un coup dur pour le nouveau gouvernement
néerlandais, qui veut justement respecter les accords initiaux. ’Beaucoup de
pays, dont les Pays-Bas, ont fait de leur mieux pour atteindre l’objectif de l’équilibre
budgétaire. De cette façon nous n’y arriverons jamais’, a fait savoir un
porte-parole des Finances" (également Trouw
p.6, De Telegraaf p.24).

 

Consommation

La confiance des consommateurs néerlandais,
mesurée chaque mois, a baissé pour la huitième fois consécutive. Elle est
descendue au niveau de la fin de l’année 1983, lorsque les Pays-Bas se
trouvaient dans la dernière phase d’une longue récession. Le président de la
Banque des Pays-Bas, Nout Wellink, estime cependant qu’ils sont beaucoup trop
pessimistes concernant l’économie. "Cela va moins bien, mais l’économie
croît toujours", a-t-il commenté. "La prospérité n’a jamais été
aussi grande et le pouvoir d’achat est également très grand." Wellink
recommande aux investisseurs de ne pas vendre leurs actions maintenant, parce
qu’"il y a de grandes chances que le vent tombe prochainement" ( De
Telegraaf
pp.1 et 6, Trouw pp.1
et 5, de Volkskrant p.15, Algemeen
Dagblad
p.20).

 

Affaires françaises 

L’ Algemeen
Dagblad
(p.5) annonce l’instruction l’an prochain d’un nouveau procès, en
appel, contre Kamel Ben Salah, condamné en avril à 22 ans de prison pour les
meurtres de Monfort.

 

A
signaler :

Le journal haguenois Haagsche Courant (pp.B1 et 3) se fait l’écho des irritations des
commerçants et des habitants du quartier de l’Ambassade des Etats-Unis. Ils se
plaignent du comportement "intimidant" et "asocial" du
personnel de l’ambassade et de la police. La Stichting Binnenstad (fondation centre-ville) juge
"inadmissible" et "dangereux pour les piétons et les
cyclistes" le dispositif de sécurité qui entoure le bâtiment et dépare
l’une des plus belles allées de La Haye.

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